Introduction : l’activité physique au cœur de la prévention des maladies chroniques
Depuis plusieurs décennies, la recherche scientifique s’intéresse au rôle fondamental de l’activité physique dans la prévention et la prise en charge des maladies chroniques. Les données accumulées ont mis en évidence que le manque de mouvement n’est pas seulement un facteur de fragilité physique, mais un déterminant majeur de l’état de santé général.
Ainsi, des pathologies comme le diabète de type 2, les maladies cardiovasculaires, l’obésité et même certains troubles neurodégénératifs présentent une forte corrélation avec le niveau d’activité physique des individus. Le cancer, maladie complexe et multifactorielle, occupe une place particulière dans ce champ de recherche. De nombreuses études épidémiologiques ont montré que les personnes actives physiquement présentent un risque réduit de développer plusieurs types de cancers et que, chez les patients déjà diagnostiqués, la pratique régulière d’exercice contribue à améliorer le pronostic, réduire les effets secondaires des traitements et accroître la qualité de vie.
Cependant, si les bénéfices à long terme étaient bien établis, les effets immédiats d’une seule séance d’exercice restaient largement inexplorés. La plupart des recherches se concentraient sur des programmes étalés sur plusieurs semaines ou mois, laissant dans l’ombre la question de savoir si un effort unique pouvait déjà produire un effet biologique mesurable.
Une étude australienne novatrice
C’est dans ce contexte qu’une équipe de chercheurs de l’Université Edith Cowan (ECU), située à Perth, en Australie-Occidentale, a mené en 2025 une étude inédite. Dirigée par le chercheur Francesco Bettariga, cette recherche avait pour objectif d’analyser l’impact direct et immédiat d’une seule séance d’activité physique sur l’organisme, et plus spécifiquement sur le développement des cellules cancéreuses.
L’originalité de cette étude réside dans son approche méthodologique : au lieu de s’intéresser aux effets cumulatifs de plusieurs semaines d’entraînement, les chercheurs ont étudié les changements biologiques induits dès la première séance. Cette perspective novatrice a permis de démontrer que l’exercice peut agir comme un véritable médicament biologique à action rapide.
Méthodologie de l’étude
Population étudiée
L’étude a porté sur un groupe de survivantes du cancer du sein, un choix pertinent puisque cette population est exposée à des risques de récidives et que l’activité physique est souvent intégrée dans les programmes de réhabilitation.
Type d’exercice
Les participantes ont été soumises à une séance unique composée de deux modalités possibles :
-
30 minutes d’entraînement en résistance (musculation),
-
ou 30 minutes d’entraînement fractionné de haute intensité (HIIT).
Ces deux types d’exercices ont été retenus pour leur capacité à induire rapidement une réponse physiologique importante et à stimuler la libération de molécules musculaires bioactives.
Collecte d’échantillons
Afin d’évaluer les effets biologiques immédiats, les chercheurs ont procédé à des prises de sang à trois moments clés :
-
Avant l’exercice (valeur de référence),
-
Immédiatement après la séance,
-
Trente minutes après la séance.
Le plasma sanguin recueilli a ensuite été mis en contact in vitro avec des cultures de cellules cancéreuses pour observer son impact direct sur leur croissance.
Résultats de l’étude
Les résultats sont à la fois significatifs et impressionnants :
-
Après une seule séance, le plasma sanguin contenait une concentration accrue de myokines, des protéines sécrétées par les muscles en activité.
-
Ces myokines ont montré un effet direct inhibiteur sur la prolifération des cellules cancéreuses en laboratoire.
-
La croissance des cellules tumorales a été réduite de 20 à 30 %, selon les échantillons et le délai post-exercice.
-
L’effet a été observé non seulement immédiatement après la séance, mais également 30 minutes plus tard, ce qui suggère une action prolongée.
Ces résultats apportent la preuve que l’exercice physique, même ponctuel, induit des modifications biologiques tangibles capables d’influencer directement l’évolution de cellules tumorales.
Discussion et interprétation
Le rôle des myokines
Les chercheurs attribuent cet effet principalement à la sécrétion de myokines, molécules aux multiples propriétés : Le rôle des myokines
Implications majeures
Cette étude comporte plusieurs implications importantes :
-
Un effet mesurable dès la première séance : l’exercice n’agit pas seulement sur le long terme, mais également de manière immédiate.
-
Une fenêtre thérapeutique : après l’effort, l’organisme devient biologiquement moins favorable à la prolifération tumorale.
-
Un complément thérapeutique : l’activité physique pourrait être intégrée comme adjuvant aux traitements conventionnels (chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie).
-
Un outil accessible : l’exercice constitue une intervention thérapeutique peu coûteuse, sans effets secondaires et accessible à tous.
Limites de l’étude
Il convient toutefois de souligner certaines limites :
-
L’étude a été réalisée in vitro, ce qui nécessite des confirmations par des essais cliniques in vivo.
-
L’échantillon portait uniquement sur des survivantes du cancer du sein, limitant la généralisation des résultats à d’autres cancers.
-
Les effets à long terme et la fréquence optimale des séances restent à déterminer.
Conclusion : l’exercice comme médicament biologique
Cette étude australienne représente une avancée majeure dans la compréhension du rôle thérapeutique de l’activité physique. Elle démontre que 30 minutes d’exercice suffisent à induire une réponse biologique capable de réduire la croissance des cellules cancéreuses de 20 à 30 %.
Ces résultats confirment que l’exercice ne doit plus être considéré uniquement comme un outil préventif ou un complément de bien-être, mais comme un véritable médicament non pharmacologique à action immédiate.
Pour les patients atteints de cancer, pour les survivants et même pour la population générale, le message est clair : chaque séance compte. Bouger 30 minutes par jour n’est pas seulement une habitude de santé, c’est une intervention thérapeutique qui agit dès la première mise en mouvement.
Ainsi, l’activité physique s’impose comme un pilier de l’oncologie intégrative, au même titre que la nutrition, le suivi psychologique et les thérapies médicales. Elle offre une stratégie simple, naturelle et universelle pour renforcer les défenses de l’organisme et améliorer la qualité de vie.
Commentaires